De Kostas Ekonomakis, traduit, interprété et recomposé avec grand plaisir et liberté par Antoinette

Les masques en Helvétie

Mal, je me sens mal
des années se sont écoulées du temps où mes yeux pleuraient de joie
mon visage alors s’illuminait de rire

Aujourd’hui en raison d’événements étranges
la tristesse, la douleur ont créé des barrières impénétrables dans mon regard et dans mon expression

L’amour est vagabond
le masque fait la joie du CoronaBond
nauséabond
il me condamne à l’abdication

Aujourd’hui je porte un masque de fausse joie
dissimulant ce que mon miroir pourrait refléter
J’ai cinq masques de couleurs différentes
et les utilise alternativement selon les circonstances

L’amour est vagabond
Le masque fait la joie du CoronaBond
Mon âme joue à l’accordéon de tréfonds en bas-fonds,
Je me morfonds

Ma joie n’est garantie que momentanément
selon le masque que je porte
Quelle couleur remplacera celle de hier
Masque de joie et de chagrin donnent de la valeur à mon miroir
Celui que j’ai été je ne le serai plus jamais

L’amour est vagabond et
ce masque fait la joie du CoronaBond
Balafon ah !  
Je franchis le rubicond
Hélas j’en suis réduis à n’être que caméléon

Je suis celui qui jamais ne portait de masque
Oublié
Je suis oublié, les autres ne me reconnaissent pas

L’amour est vagabond
Le masque fait la joie du CoronaBond
Abdication ou ascension
Comme chacun je deviens mouton

Et pourtant….

J’envoie des vidéos à mes amis sur le net
Un peu – un seul thème à la fois
pour ne pas être fastidieux
avec de belles photos
et des analyses lumineuses et subjectives
Ma voix s’efforce de rester familière, telle qu’autrefois

L’amour est vagabond
Le masque fait la joie du CoronaBond
Troublion,
j’enlève mon bâillon

Et après avoir tout expédié
plein de fierté
je souris seul
ravi de mes excellentes réalisations
et je m’exclame artificiellement et intérieurement :
cette fois j’obtiendrai davantage de likes

L’amour est vagabond
Le masque fait la joie du CoronaBond
Ahah, j’en fais des bonds
Ahah je l’envoie péter ce chefaillon

Je quitte alors la maison pour exploser et me sentir mieux
J’admire les rues si coquettes
avec un marquage impeccable,
lignes blanches droites ou pointillées
J’envie les nombreuses écoles
Je deviens fou en observant la vie si coûteuse et si précise de ce pays

L’amour est vagabond
Le masque fait la joie du CoronaBond
Cette fois c’est avec un bandonéon
que je me prends pour pharaon

Alors je soupçonne que la beauté de la vie
parfois s’approche de moi
qu’elle m’effleure
fugace
lointaine
Alors je pense à vous
une femme merveilleuse
je vous veux douce, je vous vois
marcher avec grâce
vous émerveillant dans les rues commerçantes
vous attendant aux surprises que la vie vous prépare
Au début j’imagine
qu’elle vous lancera une boule de crème glacée
dans votre café brûlant
puis que vous vous habillerez avec des couches pour bébé
l’un de vos rêves
Et enfin que la route deviendra un sentier caillouteux
pour les ânes chargés du poids de la vie
pour vous et pour lui

L’amour n’est plus vagabond
Le masque fait toujours la joie du CoronaBond
Et tel un écrivaillon dans un abandon
Je reçois l’amour et son aiguillon

Je te vois marcher
la clé du bonheur à la main
t’allongeant
pour débloquer le coffre-fort du destin
Bravo chérie !
retouche ton maquillage pour que ton sourire reste parfait

L’amour n’est plus vagabond
Le masque toujours fait la joie du CoronaBond
Non non non nous n’abdiquerons
Non non non avec l’amour nous vainquerons

Enfin j’aime que la femme soit attirante
quand elle se lève de sa chaise
quand elle pénètre dans l’ascenseur
quand elle porte ses boucles d’oreilles
Elle sait à l’avance que la mammographie sera négative
elle sait qu’elle est belle même
quand le son de la cloche à la porte d’entrée résonne faiblement
quand elle ouvre ses bras pour m’accueillir

L’amour me rend vagabond
Le masque fait la joie du CoronaBond
Au diable ce bâillon
Si Dieu le veut nous vibrerons

Le lendemain revêtu de mes chaussures, de ma veste préférée
téléphone portable dans la poche je pars
mon esprit s’échappe et je surfe en voiture
dans les rues bondées ou vides parfois
je compare les désirs, les rêves
je compare constamment
mes voyages sur internet
et mes voyages en voiture
dans les deux, la surprise peut surgir et me visiter
mon attention se dérobe de toutes parts
promenades
promenades
promenades
promenades dans les rues d’Helvétie
Je compare, j’évalue, je décide, je compte, je m’excuse
Confession

L’amour me rend-il vagabond ?
Le masque se désespère d’être la joie du CoronaBond
Je refuse d’être un mouton
Je rejette ce bâillon

Comment puis-je poignarder au cœur ma nostalgie ?
Peut-être devrais-je arrêter mes horloges célestes
Peut-être vais-je détruire les rames dans mes fonds marins
jusqu’aux profondeurs de mon âme, de mes pensées
Peut-être ne ferai-je rien
Je ne peux rien faire
Je peux arrêter de craindre la perte de l’amour
Peut-être que la route suffit
Le mensonge du rêve lui ne suffit pas
Cependant bien assis dans ce voyage
pour mon corps le coussin du siège de la voiture me suffit

L’amour vagabond
Le masque fait la joie du CoronaBond
Sur moi défilent les saisons
Serai-je quand même un mouton ?

Je reprends le chemin du retour
J’entame une conversation avec une petite pétole de shit
et je bois quelques bières
Alors je reconnais les limites du jardin imaginaire et
je chante
« a thin ligne between love and hate »
Et je chante
C’est juste un déclic en ,moi-même
Dans mon salon après mes voyages inutiles
Et je chante : viens la nuit, viens me chercher et me peindre le visage
le jour venu pour me sauver de mes grands voyages jusqu’en Jamaïque
Et je chante : viens Pablo Castaneda avec ta fumée
viens le marin avec ton rhum ou ton thé apportant des sirènes
Et j’écris
pour l’époque à propos de choses humaines

L’amour vagabond
Le masque, funèbre oraison
ne fait plus la joie du CoronaBond
Devant moi s’ouvre l’horizon

La Neuveville, le 11.01.2021
Kostas et Antoinette le 9 février 2021